De graves événements agitent la Syrie depuis un mois et demi. Un cercle infernal de manifestations et de répression a fait des dizaines de morts, parmi les citoyens, les militaires et les policiers. Les Syriens sont inquiets face au spectre d’une guerre civile et d’une intervention étrangère.
Les États-Unis financent l’opposition syrienne depuis 2006
Les États-Unis ont financé en secret des groupes de l’opposition syrienne et une chaîne de télévision satellite, rapporte le quotidien américain Washington Post du 18 avril.
Le quotidien a analysé une série de télégrammes diplomatiques états-uniens diffusés par WikiLeaks. L’administration américaine a commencé à financer des figures de l’opposition sous la présidence de George W. Bush quand ce dernier a rompu ses relations avec Damas en 2005.
Les télégrammes diplomatiques révèlent que le Département d’État a financé le « Mouvement pour la justice et le développement », un réseau d’opposants syriens exilés, à hauteur de 6 millions de dollars (4 millions d’euros) depuis 2006. Ce groupe appelle ouvertement au renversement du président Assad. Les télégrammes des diplomates états-uniens décrivent ses dirigeants comme des « islamistes modérés », anciens membres des Frères Musulmans.
L’aide des États-Unis a permis à ce groupe de mettre sur pied une chaîne satellite, Barada TV, installée à Londres, qui émet depuis avril 2009, et de financer d’autres activités antigouvernementales à l’intérieur de la Syrie. Les financements ont perduré avec le président Barack Obama, au moins jusqu’en septembre 2010.
Les services secrets syriens inquiètent les Américains
Les responsables de l’ambassade américaine à Damas ont appris que les services secrets syriens avaient récolté des informations sur ces financements. C’est ce que démontrent leurs messages publiés par WikiLeaks. Les autorités syriennes « considéreront certainement tout financement US de groupes politiques illégaux comme une tentative de soutenir un changement de régime », écrivent-ils.
Les télégrammes démontrent aussi que des exilés syriens ont reçu de l’argent d’un programme du Département d’État nommé « Initiative de partenariat pour le Moyen-Orient » (Middle East Partnership Initiative). Ces sommes transitaient par le « Conseil pour la démocratie » (Democracy Council), une ONG basée à Los Angeles. Ce Conseil a reçu 6,3 millions de dollars du Département d’État pour un programme de « concepts médiatiques » dirigé vers la Syrie, qui comprenait notamment Barada TV. Edgar Vasquez, porte-parole du Département d’État, déclare que l’Initiative de partenariat pour le Moyen-Orient a réservé 7,5 millions de dollars au programme concernant la Syrie. Mais un télégramme de l’ambassade des États-Unis à Damas révèle qu’une somme de 12 millions de dollars a été versée à ce programme de 2005 à 2010. Ce programme a cependant été découvert par les services secrets syriens, ce qui a fortement inquiété les diplomates américains. Ils craignaient même que des agents syriens aient « pénétré » le réseau d’opposants.
«
Ces événements pourraient être évités si la logique sécuritaire est remplacée par la logique politique, estiment les communistes syriens. La tragédie en cours profite seulement aux ennemis de la Syrie, aux ennemis de notre projet national, aux forces qui veulent enrayer le processus de réformes. »1 Les deux partis communistes du pays apportent leur soutien aux réformes engagées, comme la levée de l’état d’urgence, le droit de manifester, l’abolition des tribunaux d’exception, l’attribution de la nationalité aux citoyens kurdes. Ils estiment que le gouvernement doit davantage renforcer la situation économique du pays pour satisfaire les ouvriers, les paysans, les gens aux revenus modestes et les fonctionnaires. L’augmentation des salaires des fonctionnaires va dans le bon sens. Mais il serait nécessaire de renationaliser des secteurs vitaux comme celui de l’électricité ou de l’extraction d’hydrocarbures. Les communistes estiment que « l’extension des libertés démocratiques pour les masses populaires rendra la lutte contre la corruption plus efficace et plus profonde ».2
La Syrie est un pays complexe, une mosaïque de peuples et de religions. Le spectre d’une guerre civile et d’un scénario à l’irakienne est la plus grande crainte des Syriens. L’appel des réformes est aussi soutenu par des personnes qui ne mettent pas directement en doute le pouvoir du président Assad, qui pour beaucoup de Syriens reste le symbole de l’unité du pays. Les images émises par les médias occidentaux sont souvent transmis par des GSM et donnent peu de clarté sur ce qui se passe réellement dans ce pays. Dans quelle mesure les manifestations sont-elles orientées vers des réformes et dans quelle mesure sont-elles dominées par la volonté d’en finir avec le président Assad ? Et, surtout, d’où vient exactement la violence ? Nos médias occidentaux parlent systématiquement de manifestants pacifiques qui sont tués par l’armée ou la police. Or, depuis le début des événements, il y a déjà 79 policiers qui ont été tués. Cela montre que ce qui se passe en Syrie est plus complexe qu’on nous le dit.
La Russie dénonce les menaces d’ingérence
La Russie, la Chine et le Liban se sont opposés à une condamnation du gouvernement syrien par le Conseil de Sécurité de l’ONU. La crise en Syrie « ne représente pas une menace pour la paix et la sécurité internationales », a déclaré Alexandre Pankine, ambassadeur adjoint de la Russie à l’ONU. Le diplomate russe rappelle que les violences en Syrie ne sont pas unilatérales, « notamment une fusillade d’un convoi militaire, des attaques armées contre des sites militaires, des assassinats de policiers ». Selon lui, « une vraie menace pour la sécurité régionale pourrait venir d’une ingérence extérieure. De telles approches conduisent à un cercle de violence sans fin » et « pourraient provoquer une guerre civile ».3
Le ministère chinois des affaires étrangères a estimé que la Syrie pouvait résoudre elle-même les problèmes. « Toutes les parties en Syrie pourront résoudre leurs divergences par le dialogue politique, surmonter la crise actuelle et maintenir la stabilité nationale », a précisé le porte-parole du ministère chinois.4
Cécile Chams
6 mai 2011
3 mai 2011
1.Parti communiste syrien (unifié), 25 avril 2011
2. Parti communiste syrien (Bagdache), 1 mai 2011. syriancp.org
3. RIA Novosti, 28 avril 2011
4. Reuters, 28 avril 2011
Source :
http://www.ptb.be/nieuws/artikel/les-etats-unis-financent-lopposition-syrienne-depuis-2006.html
http://www.ptb.be/nieuws/artikel/syrie-entre-reformes-et-guerre-civile.html
COMMENTS